Photos d’orbes/fantômes dans des lieux hantés: une expérience scientifique

Rédigé par Basile le — Publié dans Paranormal, Parapsychologie

Après avoir déjà discuté des explications possibles des ronds de lumière fantomatiques (orbes ou «orbs») sur certaines photographies étranges, et de la «spiritualité orbique» qui l’accompagne de plus en plus (ici), il est temps de pénétrer dans l’analyse scientifique de ces phénomènes.

Le but de ce billet est de vous présenter une étude très originale qui a été conduite par deux jeunes chercheurs, Devin Blair Terhune du département de psychologie de l’Université de Lund (Suède), et Annalisa Ventola (photo ci-contre), nouvelle secrétaire exécutive de la Parapsychological Association et animatrice du site Public Parapsychology. Ils se sont rencontrés lors d’un camp d’été au Rhine Research Center et, sous l’impulsion du spécialiste de la psychologie de la hantise James Houran, ils ont monté un protocole pour une étude de terrain sur les photographies bizarres obtenues sur les lieux hantés.


Pour ce travail, ils ont bénéficié des bourses de la Parapsychological Association et de la Society for Scientific Exploration, et ont publié les résultats en deux fois:

- Terhune, D.B., Ventola, A., & Houran, J. (2007). «An Analysis of Contextual Variables and the Incidence of Photographic Anomalies at an Alleged Haunt and a Control Site». Journal of Scientific Exploration, vol. 21, n°1, pp. 99-120.

- Ventola, A., Terhune, D.B. (2007). «Evaluating photographic anomalies: examining the roles of photographic expertise, context, paranormal belief, and tolerance of ambiguity». Proceedings of presented papers at the Parapsychological Association Convention 2007, pp. 216-219.

Puis-je tirer le portrait de votre fantôme?

Voilà comment se présente l’expérimentation: quelqu’un signale que sa maison est hantée à un troisième expérimentateur qui va organiser des prises de photographie par un professionnel dans le lieu supposé hanté, mais aussi dans un lieu similaire (même nombre de pièces et, dans cette étude, simplement l’appartement d’en face!). Le photographe ne sait pas lequel des deux lieux est «hanté», et doit simplement faire son travail en prenant des photos banales de la cuisine, du salon, etc., sans chercher à mettre en scène des prises de vues angoissantes.

Il doit utiliser cinq types différents de photographies: noir et blanc, couleur, numérique, infrarouge et polaroïd. La variété des supports vise à s’approcher le plus possible de la diversité des images visibles sur le Net, mais également de tester l’hypothèse de Lange et Houran (1997b), selon laquelle ce sont les photos colorées qui ont le plus de chance de suggérer des anomalies.

Pour l’appartement qui serait hanté, les habitants devaient indiquer quelles étaient les pièces où l’activité de hantise était la plus forte. Les habitants témoignèrent d’ailleurs d’une importante d’activité durant toute la session expérimentale, ce qui rend cette étude pas aussi artificielle qu’on pourrait le penser.

Cette première étape de l’expérience est complétée par de nombreuses mesures: luminosité, taille des pièces, nombre de miroirs, nombre de tableaux sur les murs avec ou sans formes humaines, nombre de fenêtres et localisation des courants d’air, humidité, température ambiante, présence de monoxyde de carbone, et champs électromagnétiques ambiants (magnitude maximale et variabilité locale). Toutes ces étranges variables font partie des possibles facteurs environnementaux qui favorisent les vécus de hantises. Mais ici ce sont surtout des données secondaires, car l’étude sur le terrain va rencontrer quelques problèmes dont nous parlerons plus loin.

La seconde étape consiste à utiliser le pool de photographies, qui compte 175 exemplaires pour chaque site, répartis selon les cinq supports employés. Huit photographes ayant au moins trois années d’expérience sont invités, en tant que «consultants», à expertiser ces images. Ils doivent regarder les photographies et dire, sur une échelle de 1 à 4, s’ils y voient des anomalies. Une anomalie est alors définie comme une image contenant des défauts, des obscurités, des formes bizarres, etc., qui ne pourraient pas être conventionnellement expliquées par la présence d’artefacts naturels. On mesure au préalable leur croyance aux phénomènes paranormaux, sans rien détecter de très anormal de ce côté-là. Évidemment, les consultants ne savent pas quelles sont les photographies qui correspondent au lieu hanté, pas plus d’ailleurs que les deux expérimentateurs principaux. C’est donc un dispositif en double aveugle bien ficelé.

Souriez, vous êtes hantés!

Les résultats sont plutôt surprenants, et attendent d’être reproduits.

D’après les mesures des facteurs environnementaux, les deux sites ne différaient pas beaucoup. Pourtant, les consultants identifièrent plus souvent des anomalies pour les photos prises sur le lieu supposé hanté par rapport à l’appartement d’à côté (U = 13349, Z = 2.14, p = 0.033). De plus, les zones ayant la réputation d’être les plus hantées ont suggéré plus d’anomalies que les zones inactives (U = 3078, Z = 2.20, p = 0.028). D’autres analyses ont montré que les zones inactives n’évoquent pas plus d’anomalies que les pièces du lieu «témoin», et que ce sont donc les anomalies associées aux zones réputées actives qui marquent nettement l’effet (U = 5134,50, Z = 3.20, p = 0.001).

En somme, l’expérience a réussi à mettre en évidence une bizarrerie: face à des photographies prises au hasard dans 14 sites par un professionnel, lui-même aveugle quant au but de l’étude et à l’identité des sites, les 8 photographes consultés ont détecté plus d’anomalies sur les photos prises dans les zones identifiées au préalable comme activement hantées, tant par rapport au site contrôle que par rapport aux autres zones du même site.

Dans le détail des résultats, on trouve pourtant que 309 des 338 photographies (88,3%) ont reçu la note minimale de «1» signifiant qu’elles ne contenaient pas d’anomalies. On ne parle donc que de 29 photos plus ou moins étranges, et dont une seule a reçu une unique fois la note de «4» indiquant qu’elle contiendrait définitivement une anomalie. Ainsi, la plupart des consultants sont restés très critiques, et personne n’a vraiment réussi à s’entendre sur l’étrangeté de telle ou telle photo. Le consensus se base donc sur peu de choses. Et, comme prévu, ce sont les photographies en couleur qui ont été associées au plus d’anomalies, qu’elles soient prises sur le site hanté ou sur le site contrôle.

Le fantôme avait les yeux rouges

L’étude est donc intéressante car elle combine plusieurs hypothèses, psychologiques comme parapsychologiques, ce qui permet au final d’apprendre de toute façon quelque chose sur la hantise. Cette investigation contrôlée a néanmoins rencontré un accroc: alors que l’investigation en conditions contrôlées devait aussi impliquer une analyse sur le terrain, l’un des habitants a piqué une crise et s’est mis à agresser l’un des expérimentateurs. Il était complètement stressé par la situation, notamment par la reprise des phénomènes après l’intrusion des chercheurs, et aussi sous l’effet de l’alcool. Ce côté-là a été mal géré et permet de rappeler les précautions éthiques à prendre dans ce genre de recherches.

Il serait très intéressant de pouvoir reproduire une telle expérience, mais on peut déjà concevoir quelques modifications.

Tout d’abord, la nécessité pour les expérimentateurs d’être en double aveugle ne semble pas très pertinente. En effet, il peut être suffisant que le photographe professionnel agisse sans savoir de quoi il en retourne, et que les consultants en fassent de même. Les expérimentateurs doivent seulement faire le lien et assurer une bonne randomisation des images présentées. Cela résout la difficulté qui consisterait à attendre qu’une tierce personne ait à identifier un lieu hanté et un lieu contrôle pour la première phase de l’expérience. Les expérimentateurs pourraient eux-mêmes gérer le contact avec les habitants des lieux, de manière à mieux gérer la situation.

Ensuite, il serait intéressant de choisir des consultants parmi un public large de non spécialistes. Cela permettrait de mieux évaluer la fréquence des personnes pensant trouver des anomalies dans les photos, de voir ce qui est le plus à même de suggérer cela (croyances préalables, type de support, présence de tel ou tel mobilier, luminosité lors de la prise de vue, etc.). C’est d’ailleurs ce qu’ont fait Ventola et Terhune dans la réplication de leur étude.

Ils ont monté un site Internet où le test était automatisé. Le pool d’images était le même. Les sujets devaient répondre à quelques questions qui permettaient de les répartir en plusieurs catégories:

- Informés ou non informés: les sujets savaient tous qu’ils allaient examiner une série de photographies à la recherche d’anomalies. Mais seulement la moitié d’entre eux recevait l’information quant au contexte de la prise de ces photographies, à savoir une recherche parapsychologique de terrain sur un site réputé hanté.
- Groupe des enthousiastes pour le paranormal, des photographes professionnels et groupe contrôle: la répartition dépendait des réponses faites à la Revised Paranormal Belief Scale (Lange, Irwin & Houran, 2000) et à la question sur l’expertise photographique. On mesurait également la «tolérance à l’ambiguïté» avec un autre questionnaire psychologique.

L’identification des anomalies fut aussi améliorée dans cette nouvelle étude: en plus de l’échelle de 1 à 4, les consultants pouvaient préciser de quel type d’anomalies il s’agissait selon eux: bande lumineuse, flou, tâche dense, forme amorphe, ombre, image fantôme, ou une autre (avec quelques espaces pour une suggestion). On approche ainsi de plus en plus du vécu «naïf» des personnes rencontrant des anomalies sur des photographies, prises dans un contexte et des croyances préalables.


Au final, si vous connaissez un lieu réputé hanté et un lieu similaire qui ne le serait pas, il ne serait pas très difficile de reconstruire un nouveau pool de photographies et de reproduire l’expérience via Internet. Comme quoi, la recherche scientifique sur la hantise est à portée de main, et ça nous changerait un peu des ghostbusters.

Lire aussi:


28 réponses à “Photos d’orbes/fantômes dans des lieux hantés: une expérience scientifique”

  1. NEMROD34 dit :

    Oui, en effet comme tout le le monde tu vis au milieu de poussières et pollens.
    Rien de grave.

  2. David VINCENT dit :

    Bonjour, pouvez vous m’envoyez une adresse internet afin que je puisse vous retourner une photo où je suis pris à coté d’une « orbe » Photo que je trouve inquiètante.Phénomène à l’intérieur de l’orbe !