Une étude sur la télépathie scandalise des scientifiques
Peut-être avez-vous lu cette semaine une courte dépêche de Reuters (La télépathie téléphonique, réalité ou statistique?) qui tentait de résumer très brièvement les travaux de Rupert Sheldrake (photo ci-contre) sur la télépathie testée avec le téléphone et le courrier électronique. (Essentiellement, les sujets auraient deviné les personnes qui les appelaient avec un taux de réussite bien supérieur au simple hasard.)
Au risque de vous décevoir, il ne s’agissait pas d’une actualité même si la dernière ligne de la dépêche mentionne que d’autres recherches sur la télépathie seront menées avec des messages SMS (c’est la seule nouveauté). Les résultats de ces expériences ont été publiés par Rupert Sheldrake depuis l’an 2003 (téléphone) et 2005 (courriel). J’en ai d’ailleurs parlé sur ce blog en janvier dernier (Rupert Sheldrake aurait-il prouvé la télépathie avec le courriel?).
Dans quelles circonstances l’agence de presse Reuters a-t-elle appris l’existence de ces travaux sur la télépathie et décidé que ceux-ci feraient un bon sujet pour sa chronique «Insolite»? Sans aucun doute, c’était lors du «festival de la science» de l’Association britannique pour l’avancement des sciences (British Association for the Advancement of Science), une série de conférences qui se déroulaient cette semaine à Norwich en Angleterre.
Or la véritable nouvelle, si l’on peut s’exprimer ainsi, c’est que cette prestigieuse association scientifique avait sélectionné des chercheurs controversés (qualifiés de «croyants» au paranormal) qui ont pu présenter tranquillement leurs travaux sans avoir à se soucier des critiques, ce qui n’a pas manqué de scandaliser certains scientifiques. Et certaines réactions sont intéressantes. Vous pensiez peut-être qu’il est acceptable de faire des études scientifiques sur des phénomènes dits paranormaux? Pas pour tout le monde…
Le Times Online a suivi cette affaire. Dans l’article Scientists angered by telephone telepathy study (Des scientifiques irrités par une étude sur la télépathie avec le téléphone), l’éditeur scientifique du journal britannique explique que des chercheurs ont été choqués de voir que les conférences de Rupert Sheldrake, et celles de deux autres présentateurs, ont été livrées au public sans qu’aucun sceptique ne puisse apporter un point de vue critique.
Des exemples de critiques pour les expériences avec le téléphone? Des possibilités d’indices sensoriels. Dans une des expériences, les sujets qui devaient tenter de deviner le nom de l’appelant le faisaient après avoir décroché le téléphone (indices possibles : qualité de la communication, respiration de l’appelant, bruit ambiant, etc.). Un autre exemple : les résultats auraient pu être biaisés par l’heure des appels (possibilité de deviner l’appelant qui est très ponctuel ou toujours en retard).
Si de nombreux scientifiques estiment que la télépathie est un sujet de recherche légitime, d’autres ne cachent pas leurs idées bien arrêtées sur le sujet. Ma citation favorite (pour être honnête, c’est la pire de toutes celles qui ont été publiées dans un autre article intitulé Theories of telepathy and afterlife cause uproar at top science forum ) :
«La recherche dans ce secteur est une perte totale de temps. Bien qu’il soit « politically incorrect » d’éliminer des idées d’emblée, dans ce cas il n’y a absolument aucune raison de penser que la télépathie puisse être autre chose qu’une rêverie de charlatan» (Peter Atkins, professeur de chimie physique à l’Université d’Oxford – traduction maison)
Pour éviter que mes propos ne soient mal interprétés, je répète : cette dernière citation représente un avis extrême. La plupart des scientifiques montraient une certaine ouverture d’esprit face à ces études sur le paranormal, mais s’attaquaient au fait que ces recherches n’étaient pas critiquées lors de leur présentation (ce qui me semble par ailleurs tout à fait justifié).
Pourquoi porter mon attention sur cette citation percutante? Parce qu’il y a quelque temps, je lisais un article qui suggérait justement qu’en adoptant ce type d’attitude, on pouvait obtenir un effet opposé à celui qui est recherché.
Bien qu’il ne soit pas récent, ce très long article (Hansen, George P., CSICOP and the Skeptics: An Overview, The Journal of the American Society for Psychical Research, Volume 86, No. 1, January 1992, pp. 19-63) me semble toujours être d’actualité.
Il étudie le CSICOP (Committee for Scientific Investigation of Claims of the Paranormal – comité pour l’investigation scientifique des prétentions du paranormal), un groupe de sceptiques de la ligne dure pour qui tout phénomène apparemment paranormal est le résultat d’une fraude ou d’une tricherie, ou peut s’expliquer avec les connaissances scientifiques actuelles. En résumé : le paranormal n’existe pas.
Ce point de vue pourrait se justifier si le groupe, comme son nom le suggère, menait des enquêtes et faisait des recherches mais, selon George Hansen, ce n’est que très rarement le cas. En outre, le CSICOP afficherait une attitude hostile face à la recherche sur des phénomènes paranormaux tout en cherchant le soutien des scientifiques. George Hansen suggère ainsi que le commun des mortels pourrait croire que les déclarations de CSICOP représentent l’avis officiel de la science sur le paranormal. Et comme bon nombre de gens pensent avoir vécu des expériences paranormales, l’attitude du groupe pourrait avoir des conséquences déplorables:
«Ceux qui ont eu ces expériences, mais qui se trouvent confrontés à une attitude de dénonciation par des « autorités scientifiques », pourront probablement conclure que la science est dogmatique et inapplicable pour certains aspects importants de leur vie.»
Ce qui, toujours d’après l’article de George Hansen, pourrait favoriser le «rejet de la science» et même la croissance de «mouvements irrationnels» pouvant mieux répondre aux attentes du public (c’est le scientifique et ufologue Jacques Vallée qui est cité ici). Ce qui est évidemment à l’opposé des objectifs du CSICOP.
Vous trouvez cela exagéré? Peut-être mais ce sont des risques potentiels. Enfin… Vous voyez le lien avec la déclaration de Peter Atkins… Et si vous êtes parvenu à ce point en lisant depuis le début, je dois vous féliciter. Je crois que j’ai été particulièrement assommant aujourd’hui. J’avoue que je suis moi-même un peu amorti.
Lire aussi:
- La télépathie testée avec la réalité virtuelle
- Salon de la parapsychologie ou salon de la voyance?
- Rupert Sheldrake aurait-il prouvé la télépathie avec le courriel?
- Quand les événements les plus improbables se produisent tous les jours
- Une maison hantée par... les infrasons?
Non, ce n’était pas assommant !
Fiou!
Quelqu’un d’autre a réussi à lire jusqu’au bout (sans tricher) ?
J’ai trouvé cet article intéressant. Bon, j’avoue qu’à force de lire des critiques assez basses sur la recherche du paranormal, dans des forums soi disant scientifiques (mais où tu te fais « jeter » si tu n’as pas le bagage intellectuel qui suit (et quand on a fait bac L…) pour démontrer tes suppositions), ça me fait toujours plaisir de voir les mouvements sceptiques extrêmes se faire critiquer à leur tour (avec arguments à l’appui). Les gens critiquant n’ayant, de plus, jamais lu un seul article sur le sujet (ou alors aucun qui ne soit neutre). Je suis relativement « sceptique » mais j’essaye de m’informer un maximum avant de parler d’un truc. Plus je m’informe, plus je pense que la recherche sur le paranormal est légitime et doit se poursuivre. Et, à force de lire autant d’attaques injustifiées, j’en viens effectivement à rejeter la science (ou plutôt une partie des scientifiques que je trouve très « dogmatique »).
Sinon, un exemple concret de critiques basées sur des à priori : Science et Vie a fait récemment un hors série sur les miracles. J’ai vu des gens critiquer ce numéro sans même l’avoir lu et en accusant le magazine d’être parrainé par l’Eglise catholique. Pourtant, j’ai lu ce magazine et je n’y ai rien vu de scandaleux. Quelques articles sur les guérisons spontanées (ce qui donne son nom au hors série), un sur les NDE, un sur la parapsychologie, etc…
Voilà, c’était l’avis d’une jeune fille de 19 ans sur la question
Bonsoir Roshieru, merci pour votre témoignage instructif et bravo pour votre lucidité
>> Quelqu’un d’autre a réussi à lire jusqu’au bout (sans tricher) ?
Oui, moi, moi !
Je suis tout à fait d’accord avec cet article. J’ai un autre exemple assez frappant, qui est l’article du Skeptic Dictionnary sur le rêve lucide.
Au lieu d’expliquer scientifiquement le phénomène, ils dénigrent le Pr Laberge, qui est le premier à avoir prouvé son existence, parce qu’actuellement, pour gagner sa vie, il fait des cours mélangeant rêve lucide et yoga.
Ce type d’attitude qui rejette le bébé avec l’eau du bain ne fait que confiner un phénomène pourtant expliqué dans l’ésotérisme. Je suis donc complètement d’accord avec le point de vue de George Hansen, qui pense que cela « favorise la croissance de «mouvements irrationnels» pouvant mieux répondre aux attentes du public ».
>> Je suis donc complètement d’accord avec le point de vue de George Hansen, qui pense que cela “favorise la croissance de «mouvements irrationnels» pouvant mieux répondre aux attentes du public”.
Notamment les sectes dont certaines basent leurs doctrines sur les capacités supposées du cerveau humain et qui poussent les gens à se ruiner dans des cours pour améliorer leurs « capacités psychiques »…
Bon, il y a aussi d’autres mouvements que les sectes mais ça me semble être le cas le plus néfaste, en termes de manipulation. Les sectes offrent à première vue un cadre rassurant pour ceux qui se sentent totalement perdus. Et comme l’on est souvent rejeté lorsqu’on témoigne d’expériences étranges… Je crois que ce n’est pas pour rien si IANDS France a fait toute une page à ce propos.
(j’ai l’impression de me répéter depuis ce matin, j’ai déjà dit presque la même chose sur un forum aujourd’hui >_>)
Le problème des études sur le paranormal, c’est qu’en effet, on est amené à douter sur l’impartialité des scientifiques et de leur interprétation des résultats…
Bonjour à tous et merci pour vos commentaires.
Dado : effectivement, le dictionnaire sceptique n’est pas toujours parfaitement objectif (mais qui l’est vraiment ?)
Roshieru : bonnes observations sur les sectes et IANDS France. J’aime bien votre perspective.
Kwa : on doute surtout des études dont les conclusions vont à l’encontre de nos convictions, et c’est bien humain
En ce qui concerne l’interprétation des résultats, les pairs sont toujours là pour commenter et critiquer. Et au lieu de se préoccuper de l’impartialité des chercheurs, on devrait plutôt travailler en collaboration pour améliorer les méthodologies (plus facile à dire qu’à faire, je sais). Merci, vous soulevez des points très importants.
Bonjour à tous,
Il faut bien comprendre que le paranormal engendre chez chaque individu des réactions différentes. Il confronte le sujet à l’inconnu et nous avons tous un rapport complexe à cet inconnu.
Même s’il existe un gradient de réactions, on peut cependant repérer deux mouvements principaux : les « croyants » et les « croyants incroyants ». Dans ces deux cas, il s’agit de personnes qui s’affranchissent des faits, de façon plus ou moins prononcée, de façon à résoudre cette relation à l’inconnu et cela de deux façons possibles : en faisant comme s’ils connaissaient son explication (les croyants) ou en faisant comme si elle n’existait pas (les croyants incroyants).
Le problème, c’est qu’il y a parmi la communauté scientifique un certain nombre de croyants incroyants.
Cela engendre un phénomène encore mal connu mais qui commence manifestement à se savoir : les dérives de certains organismes, à vocation scientifique, qui sous couvert de rationalité et de scientificité, proposent en réalité une approche biaisée du paranormal.
C’est le cas du CSICOP et de la quasi totalité des organismes sceptiques à des degrés divers. Le problème, c’est que ces organismes travaillent principalement au niveau médiatique et il est donc très complexe de mettre en lumière les biais des approches de tels organismes.
Prenons un exemple récent : le test de la petite Natasha par certains membres du CSICOP. Le test a été très mal fait, les membres du CSICOP ont clairement menti à la petite fille, etc. Tout cela pour dire que le test n’était pas un test scientifique valide et de qualité permettant réellement de tester ce que rapportait Natasha. Certains parapsychologues ont tenté de mettre en lumière ces biais mais malheureusement cela ne passe généralement pas au niveau médiatique. Au final, on se retrouve avec un reportage biaisé et un article dans le Times qui lui aussi ne donne qu’une partie des informations. Cela permet ainsi de façon récurrente de décrédibiliser toute recherche sur le paranormal.
Depuis quelques années, un certain nombre de scientifiques ont commencé à prendre conscience de ce phénomène que l’on a aussi en France, le dernier Science et Vie sur les fantômes en étant un magnifique exemple.
Il est vrai que les parapsychologues ont généralement préféré ne pas répondre à ces affirmations gratuites pensant de toute façon qu’il n’est pas possible de répondre à de telles argumentations qui sont le plus souvent ad hominem. La littérature sceptique en est bourrée, il suffit de trouver les comptes-rendus initiaux : regardez ce que disent ceux qui étaient présents lors du projet Alpha, les recherches cachées du CSICOP, les procès de Randi, les rapports des anciens membres du CSICOP qui parlent des pratiques de cet organisme, les articles de Hansel sur Rhine, les raisons pour lesquelles Wiseman a été exclu de plusieurs sociétés de recherche, etc… c’est assez effrayant. C’est un vrai travail de désinformation qui dure depuis près d’un siècle.
Les parapsychologues commencent à s’organiser pour lutter contre ça et Internet semble manifestement aider grandement à la propagation d’informations à ce sujet. On remarquera notamment ce site, avec des attaques parfois virulentes, mais qui est l’un des seuls qui permettent d’avoir un autre son de cloche :
http://www.skepticalinvestigations.org/
Après, il y a quelques auteurs indépendants comme Hansen ou le regretté Truzzi qui eux aussi ont essayé ou essayent de faire passer le message.
Tout cela est de toute façon très complexe et n’est pas prêt de passer car ces conséquences de mouvements de croyances se jouent à de nombreux niveaux, allant aussi bien des chercheurs eux mêmes qu’à l’ensemble de la population en passant par les médias.
Le seul moyen de lutter contre ceci semble être le développement de départements scientifiques au sein d’universités sur ces questions, mais ils sont encore limités.
Merci Bob pour ces merveilleux commentaires. C’est vrai que les sceptiques extrêmes (ou dogmatiques comme Sheldrake les appelle) tentent à tout prix de faire valoir leur point de vue et n’hésitent pas à employer la désinformation si cela s’avère nécessaire dans certains cas.
Par contre, ils font également un travail utile en dénonçant le charlatanisme évident.
Le principal problème (enfin, de mon point de vue), c’est qu’ils ne font pas de distinction entre les charlatans qui veulent vous vendre un élixir de vie éternelle ou un bracelet pour voyager dans le temps, et les chercheurs qui, en utilisant une méthodologie scientifique, étudient des phénomènes tels que la perception extrasensorielle. Bref, tout ce qui semble un peu étrange se retrouve dans le même sac, où les (vrais) parapsychologues des universités côtoient les hurluberlus de tout acabit.
Pas plus tard qu’hier, je lisais une actualité où l’on parlait d’un éminent physicien asiatique qui avait fait des recherches sur la perception dermo-optique, et qui était automatiquement qualifié de «partisan du paranormal» de ce fait. Pour les sceptiques de la ligne dure, le simple fait de mener des recherches sur un sujet apparemment «paranormal» signifie que vous êtes un rêveur naïf, ou même un charlatan, et que vous faites la promotion du paranormal.
J’aurai certainement l’occasion de revenir sur ce sujet. Bob, merci encore pour toutes ces informations et pour le lien du site (que je fréquente d’ailleurs). Au plaisir.
Bonjour JC,
C’est à dire que les sceptiques sont sur des positions idéologiques fortes. Selon eux, le paranormal n’existe pas. Et s’il existe, il doit alors être prouvé selon un cadre clairement défini. Cette vision des choses repose généralement sur une épistémologie naïve à base de théorisations popperiennes (qui sont d’ailleurs généralement perverties) et de considérations de bons sens qui font de la science une théorisation qui rassure. Elle permet de déterminer ce qui est, et ce qui n’est pas, ce qui existe et ce qui n’existe pas. C’est une bonne chose, sauf lorsque les théorisations scientifiques confrontées à leurs limites deviennent dogmatiques et cachent la réalité.
L’une des limites fondamentales, et qui interroge l’ensemble des sciences, est la différence entre l’observateur et ce qu’il observe. C’est la question fondamentale que pose la parapsychologie. L’ensemble de nos disciplines scientifiques repose soit sur :
- Une distinction claire entre observateur et ce qui est observé (sciences exactes)
- Une réflexion sur l’incidence de l’observateur sur ce qui est observé (sciences humaines).
La parapsychologie se situe à la rencontre de ces deux approches. Elle suppose qu’un matériel physique ou biologique va pouvoir être influencé (et pas seulement dans la façon dont on le théorise) par un observateur. Cela a des incidences énormes sans pour autant remettre en question l’ensemble de nos connaissances. Ces interactions ne se produiraient que de façon exceptionnelle.
Les physiciens du début du siècle avaient déjà tout à fait cerné ce problème concernant la place de l’observateur. Mais ces débats sont plus ou moins restés dans l’ombre ainsi que cette question restée non résolue. Elle ne permettait pas des applications pratiques.
Les expériences paranormales pourraient ainsi être les signes de ces interactions spécifiques et méconnues. Les physiciens allemands réfléchissent depuis déjà longtemps à ces questions et W. von Lucadou à certainement développé la théorie la plus aboutie: le MPI
http://www.metapsychique.org/P.....-de-l.html
Le problème, et il est de taille, c’est que si ces phénomènes existent, ils se produisent selon des canaux d’informations encore inconnus. Plus embêtant encore, ils se produisent en lien avec des organismes complexes comme l’être humain. Toute mise en équation devient dès lors particulièrement délicate…
Tout cela pour dire que ces questions sont particulièrement complexes. On ne peut les comprendre qu’à la rencontre de champs de recherche différents et à des niveaux très approfondis.
L’approche des sceptiques comme Randi est généralement à l’opposé de cela. Les méthodologies et les modèles de compréhension sont relativement simplistes. Les maîtres mots sont : éduquer, informer, diffuser, lutter contre le charlatanisme. Nous ne sommes pas réellement dans une démarche scientifique, nous sommes dans une démarche idéologique qui s’appuie sur des référentiels scientifiques. Quand ces derniers rencontrent la complexité des recherches des parapsychologues, ils ont généralement plusieurs attitudes :
- l’omission (Broch),
- le mensonge (Hansel et Randi)
Il n’existe pas à l’heure actuelle un ouvrage qui reprend toutes ces omissions et ces mensonges. Cela intéresserait-il les sceptiques ? Je ne sais pas. Cela n’a pas vraiment d’importance pour eux si certains sceptiques mentent ou omettent les faits car ils sont généralement dans une croisade. Quand on propose ces arguments à des sceptiques, ça ne les intéresse guère. Quand on côtoie des groupes sceptiques, on rencontre d’ailleurs généralement plusieurs types de sceptiques :
- Le pur et dur : quelqu’un de sa famille a été dans une secte, il a vécu une expérience particulièrement déstabilisante, etc. Pour des raisons personnelles, il est engagé comme un militant dans la lutte contre le paranormal. Ils ne connaissent pas et ne veulent pas connaître la parapsychologie. Leur but n’est pas de faire progresser la recherche.
- L’honnête : quelqu’un de réellement intéressé par le paranormal et qui pense que l’approche des sceptiques est objective. Généralement, ces gens sont touchés par les arguments des parapsychologues, encore faut-il qu’ils les connaissent. Parmi ceux ci, j’en ai rencontré un certain nombre qui ont quitté ces groupes (d’ailleurs généralement sans leur dire leur raison car, quoi qu’ils en disent, la pression est forte dans ces groupes).
C’est un peu caricatural mais celui qui a côtoyé ces groupes verra de quoi je parle. A noter, et c’est très important, qu’on trouve les mêmes dérives de l’autre côté chez les parapsychologues. Cependant, chez les VRAIS parapsychologues, ceux qui sont universitaires, scientifiques, membres de PA, on trouve généralement une grande rigueur qu’on ne trouve pas chez les sceptiques. Il suffit de comparer le niveau des publications du CSICOP avec celles de PA. Ce sont deux univers différents. De la même façon, un labo comme le KPU a les meilleures notes du département de psychologie au niveau des publications car ce sont des recherches de pointe. Un autre point met la puce à l’oreille : les parapsychologues connaissent parfaitement les publications sceptiques, je n’ai jamais constaté l’inverse hormis quelques sceptiques de bon niveau comme Hyman ou Wiseman. Le sceptique lambda ne connaît pratiquement rien à la parapsychologie. Il en a une vision déformée.
En outre, les sceptiques utilisent une arme facile : l’amalgame. On mélange tout : ésotérisme, monstre du Loch Ness, anges, et parapsychologie scientifique. Les médias se chargent de conserver cet amalgame et le tour est joué :
- on montre que tout ceci n’est qu’affabulation,
- on décrédibilise toute recherche sur le sujet,
- la cause rationaliste triomphe.
Cela engendre de nombreux problèmes :
- Cela nuit à la recherche scientifique. Ce n’est pas ainsi qu’il sera possible de mettre en place des recherches sérieuses en milieux universitaires pour essayer de tout expliquer rationnellement.
- Cela élude les vraies questions que pose la parapsychologie, qui sont extrêmement intéressantes pour l’ensemble du champ scientifique.
- Cela donne une image dogmatique de la science à ceux qui vivent ces expériences ou connaissent les travaux de parapsychologie.
- Enfin et c’est le plus grave, à supposer que ces phénomènes existent, les personnes qui vivent ces expériences souffrent beaucoup par la faute de cette façon de faire. Ils n’ont pas de place. Et ces gens malheureusement parfois se tournent vers les sectes qui très intelligemment reprennent certains de ces faits véridiques pour ensuite les faire adhérer un ensemble fictif.
L’approche sceptique aurait ainsi des conséquences inverses de ce qu’elle recherche. Cela reste très difficile à évaluer et méritait là aussi des recherches.
Bob, je n’ai qu’un mot à dire : wow!
Très finement observé, analysé et synthétisé. Vous soulevez des points tout à fait pertinents qui ne sont que très rarement discutés (et pratiquement jamais dans les grands médias).
À propos de vos deux catégories de sceptiques : personnellement, je n’ai jamais fréquenté ce type de groupe mais je peux les voir à l’oeuvre dans les forums de discussion sur Internet. On peut même souvent y observer un nouveau «pur et dur» (émotif et parfois agressif) qui demande aux plus expérimentés comment convaincre un «partisan» du paranormal qu’il s’illusionne sur tel ou tel sujet. On lui donne alors une recette et il va probablement répandre la bonne nouvelle autour de lui.
En ce qui concerne les conséquences de ce vous appelez l’«amalgame», cela me semble tout à fait juste comme je le disais précédemment. Dans un autre message, vous disiez vous-même que «le seul moyen de lutter contre ceci semble être le développement de départements scientifiques au sein d’universités» (de parapsychologie). Parfaitement d’accord, mais qui va payer pour ces nouveaux départements?
Une dernière remarque. Bob, vous dites : «Il n’existe pas à l’heure actuelle un ouvrage qui reprend toutes ces omissions et ces mensonges. Cela intéresserait-il les sceptiques ?»
Je n’ai jamais vu un tel ouvrage non plus. Avez-vous déjà commencé à travailler sur ce livre? Sinon, vous devriez. S’il est bien vulgarisé et comporte beaucoup d’exemples concrets, vous tenez peut-être un best-seller en puissance. Oui, je pense qu’avec le poids des arguments, cela pourrait intéresser les sceptiques, les dogmatiques comme les plus modérés, ainsi que les gens qui s’intéressent au paranormal et aux sciences. (Par contre, côté publicité, il faudrait probablement compter davantage sur le bouche-à-oreille et sur Internet que sur les grands médias. Quoique…)
Bonjour JC,
Quelques commentaires sur des points que vous soulignez (cela permettra aussi d’affiner mes propres réflexions !) :
En effet, pour les sceptiques il est souvent essentiel d’arriver à convaincre l’autre qu’il est dans l’erreur. On peut supposer que cela rejoint des raisons psychologiques personnelles profondes. Certains psychologues ont remarqué chez les sceptiques une période d’emprise dans l’enfance par un proche concernant une croyance à laquelle ils ont adhéré un temps et dont la sortie fut très douloureuse. Il s’agit fréquemment de croyances religieuses. Si vous discutez avec des sceptiques, vous remarquez aussi souvent qu’ils disent « Moi aussi j’y ai cru, je comprends ce que tu vis, je suis passé par là ». C’est ainsi qu’on retrouve concernant la plupart des sceptiques des anecdotes quand ils étaient plus jeunes lors desquelles ils ont cru à des choses complètement loufoques.
Le fait de devenir sceptique, pour eux, c’est une solution psychique comme une autre : soigner les autres pour se soigner eux-mêmes. Sur le plan psychologique, on parle d’identification projective. En projetant en l’autre ce conflit auquel ils ont été confrontés, ils peuvent le « traiter psychiquement ». Ce qui est assez ironique c’est qu’on retrouve exactement le même processus mais inversé, chez un voyant. C’est pourquoi aussi bien chez le sceptique que chez le voyant, on a généralement le sentiment qu’il est très difficile de les atteindre réellement dans leurs convictions les plus profondes. Pourquoi ? Car dans ce type de relation, ils projettent dans leur interlocuteur ce qui leur appartient. Donc, pour un sceptique par exemple, un parapsychologue est forcément quelqu’un qui a cru comme lui a cru avant. Et le processus d’identification projective est alors à l’oeuvre. Consciemment cela donne « je vais l’aider car il est dans l’erreur mais pour cela je l’aiderai avec la raison et des arguments scientifiques ». Sur le plan inconscient c’est « il se fait avoir comme je me suis fait avoir. Je vais réparer cela chez lui comme j’ai toujours voulu le faire chez moi ». Cela explique aussi pourquoi on trouve souvent, de façon plus ou moins prononcée chez les sceptiques, et de façon plus ou moins consciente, un certain dégoût vis à vis des croyants : elle leur rappelle cette part d’eux-mêmes contre laquelle ils luttent profondément. Cela donne ensuite des sceptiques plus ou moins « hard » selon leur rapport à cette dimension. Plusieurs observateurs ont décrit de véritables crises de rage chez des gens comme Randi par exemple face à certains parapsychologues les mettant en difficulté. Tout leur univers tourne autour du fait de lutter contre ce paranormal et qui fait partie de leur vie psychique. Il y a généralement une profonde blessure narcissique qui explique un tel acharnement.
L’ensemble du vernis des organismes comme le CSICOP et la majorité des groupes sceptiques finit généralement par se fissurer quand on les côtoie régulièrement. C’est ce que remarque assez justement Hansen à propos de l’ironie des sceptiques. Le simple fait de prononcer un nom comme « Rhine » ou « Sheldrake » déclenche en eux de l’ironie, du rire, des sarcasmes. Je crois que c’est Hansen qui décrivait également l’acclamation lors d’un congrès sceptique quand un intervenant avait indiqué qu’un laboratoire de parapsychologie avait disparu (je me demande même si ce n’était pas suite au décès d’un parapsychologue!).
Ces quelques réflexions, concernant la réalité ou non du psi, ne sont pas importantes. En revanche elles sont essentielles car elles montrent une tendance « pathologique » que l’on trouve de façon plus ou moins prononcée chez l’ensemble des scientifiques. Si ces derniers étaient sensibilisés à ces dimensions inconscientes, un certain nombre gagneraient certainement en objectivité dans leur travail.
Ensuite, concernant les financements de laboratoires. C’est assez complexe. Il faut généralement des dons extérieurs comme ce fut le cas à Edimbourg. Mais les mentalités changent et en Grande Bretagne plusieurs départements ont pu être ouverts grâce au travail de Bob Morris. Peut-être en France aurons nous également un jour quelqu’un de l’intelligence de Morris. Je pense que le problème vient du manque d’information. Si les gens, et tout particulièrement les universitaires, savaient ce que savent les parapsychologues. S’ils connaissaient les travaux solides, ils changeraient leurs positions car sur le plan rationnel, leur argumentation est tout à fait légitime : il existe à l’heure actuelle des résultats d’expériences qui nécessitent d’être expliqués et qui sont fondamentaux pour l’ensemble du champ scientifique. Si ces informations commencent à être connues, il se produira alors un effet boule de neige comme il s’en est produit dans la culture occidentale tous les 60 ans en moyenne (sauf au cours du XXe siècle). Ces phénomènes deviendront alors le sujet d’étude des élites. Mai s’ils restent mystérieux, ils finissent par être éjectés comme un corps étranger car non assimilable par la société. Il arrivera un jour où ces données pourront enfin être assimilées d’une façon ou d’une autre.
Enfin, concernant la rédaction d’un ouvrage qui reprend les omissions et les mensonges des sceptiques, ce serait très intéressant mais cela demanderait un temps considérable. C’est un travail à la rencontre entre épistémologie et psychologie. Les Anglo-saxons parlent de « pathological disbelief » mais leurs analyses restent encore superficielles. Ce pourrait être l’objet d’un travail de recherche approfondi mais encore faudrait-il trouver un groupe de sceptiques qui soit d’accord pour participer à cela. Et puis il faudrait également faire très attention à bien distinguer un fonctionnement inadapté de sceptiques et la réalité du psi. On peut tout à fait imaginer que les sceptiques fonctionnent de façon pathologique mais que le psi n’existe pas pour autant !
Voilà, je tiens à dire déjà que j’ai lu l’article en entier et qu’il est très intéressant. Maintenant, je voudrais dire, surtout en m’adressant à Roshieru et tous ceux qui ne sont pas d’accord, pour moi, tu as tout à fait raison : les études de tous ces phénomènes là ne devraient pas se faire ou à la rigueur en cachette. Ma mère a fait une grosse déprime et est rentrée là dedans. Comment a-t-elle trouvé cette idée? Si on arrêtait d’en parler, les gens ne se feraient pas de film sur des choses qui n’existent pas. Je pense que tout ça ne devrait pas se dire. Voilà, ma mère est tombée bien bas et je ne sais pas comment elle a trouvé cette idée.
Bonjour Loane,
Une petite mise au point: les sources citées suggèrent justement qu’il pourrait y avoir un danger à ne pas étudier et parler publiquement des phénomènes «paranormaux», et Roshieru (et les autres) semblent plutôt d’accord avec cette perspective.
Bonjour Bob, merci pour tous ces commentaires et ces arguments. Je suis ébloui. Vous êtes extrêmement bien documenté sur le sujet et, pour revenir sur le thème d’un ouvrage grand public qui expliquerait clairement la situation de la recherche en parapsychologie en relation avec les groupes de sceptiques extrêmes, je continue de flairer le best-seller, surtout si vous pouvez l’écrire en anglais. En outre, vous pourrez certainement compter sur James Randi pour démarrer votre campagne publicitaire et médiatique.
>>>les études de tous ces phénomènes là ne devraient pas se faire ou à la rigueur en cachette. Ma mère a fait une grosse déprime et est rentrée là dedans.
Euh, quitte à répéter ce qu’a dit JC, je n’ai pas du tout dit ça. Ce que je déplore, c’est qu’en ne permettant pas une recherche SERIEUSE de se faire, les sceptiques fournissent en fait des armes aux sectes et compagnie, qui s’accaparent les phénomènes paranormaux pour en faire leur cheval de bataille.
C’est un peu le même problème avec certaines médecines dites parallèles qui, si elles ne sont pas dangereuses à la base (je me soigne par homéopathie car j’ai des allergies à certains composés des antibiotiques, je n’ai jamais eu de problème), peuvent devenir dangereuses entre les mains de manipulateurs (guérissez votre cancer par l’homéopathie ou l’acupuncture). Idem pour certains « régimes ».
Communiquer au public, d’une façon honnête et après recherche, sur le but de ces médecines et leurs possibilités peut éviter que certains se laissent prendre dans l’engrenage des sectes (entre autres). Il faut en faire de même, je pense, avec le paranormal. Mais sans chercher, comme on le fait trop souvent, à mépriser la personne qui vit l’expérience, ce qui l’amène souvent à se réfugier dans un message plus rassurant qui est celui de la secte. Il faut comprendre qu’on n’étudie pas le paranormal comme on étudie la physique. Il faut aussi penser à l’impact sur la personne, la prendre en charge. Je vois certains sceptiques se foutre allégrement de la gueule de ceux qui viennent leur raconter des expériences, je ne suis pas sûre que ce soit plaisant pour le « témoin », qui a le courage de faire la démarche de poser des questions. A l’inverse, des croyants commencent à fantasmer totalement sur ce qu’a vécu le témoin, bien souvent en faisant rapport avec leurs propres croyances. « Oh, tu as vu ton ange gardien » ou des trucs comme ça. Résultat, quand tu viens parler de paralysie du sommeil ou d’états modifiés de conscience à cette personne, elle t’envoie chier même si ce qu’elle a vécu correspond parfaitement aux symptômes énoncés.
De même, je ne suis pas sûre qu’une personne qui soit accusée de charlatan ou de mystificateur par les sceptiques ait toujours conscience de mentir sur ses pouvoirs. Certains ne sont pas du tout honnêtes, mais d’autres peuvent être persuadés de leur « don » en raison de leur croyance ou parce que personne ne leur a expliqué ce qu’il vivait, autrement qu’en les méprisant (donc, on obtient un rejet de l’explication par le sujet).
En gros, comme on le dit souvent, la recherche sur le paranormal doit concerner plusieurs secteurs des sciences. Il ne suffit pas d’analyser froidement une liste de statistiques, il y a d’autres facteurs à prendre en compte.
J’espère que ce que je pense est plus clair à présent.
A propos de télépathie, avez-vous vu l’expérience qui avait été diffusée dans Normal Paranormal ? J’ai personnellement été bluffé par cette jeune femme dont j’ai récemment trouvé le site. Pour ceux que cela intéresse:
http://phenomenes-psi.site.voila.fr/index.html
On y voit l’expérience en images.
Freud n’aimait pas la télépathie.
Jung aimait la télépathie
Rhine le créateur des cartes de Zener est mon psy préféré.
le rhine research center est dirigé par sa fille Sally , psy comme ses parents, à la duke university
A ceux qui aime la télépathie
Guillaume
je ne comprends pas qu’on appelle des phénomènes encore inexpliqués (puisque la science ne s’y intéresse pas, elle ne risque pas de trouver !) »paranormaux » ! en confondant avec des phénomènes dits ésotériques ! je trouve ça complètement stupide. on ne connait pas encore tout le fonctionnement du cerveau, c’est tout. et il serait à mon avis, intéressant d’avoir l’esprit assez ouvert en cessant d’avoir des à priori, (religieux, païens, imageries moyennageuses !) pour tenter quelques recherches. les scientifiques chercheurs, cherchent où on leur dit de chercher, et dans les domaines où on les paye, tout ça est très conventionnel.
Je vois certains sceptiques se foutre allégrement de la gueule de ceux qui viennent leur raconter des expériences, je ne suis pas sûre que ce soit plaisant pour le « témoin », qui a le courage de faire la démarche de poser des questions.
Par exemple ?